C’est le quatrième cours de préparation à l’accouchement, que je suis consciencieusement, bien que la position de la crevette (son identité de fourmisseau ou fourmissette n’est pas encore connue) laisse présager un recours à une césarienne.
Après avoir parlé péridurale, nous attaquons la phase relaxation. Entre deux contractions, il faut pouvoir se réfugier mentalement dans un environnement agréable et reposant. Toutes les futures mamans se concentrent sur leur paysage. Je ferme les yeux.
Je suis… je suis sur une plage de sable fin, en Bretagne. La brise me caresse le visage et je me laisse transporter par le bruit des vagues. Un truc me chatouille l’oreille. Encore une de ces puces de plage qui sautent partout, c’est agaçant. Un ballon me frôle et va taper le rocher à côté de moi, un petit garçon arrive en s’excusant. Je crois que je vais aller m’installer ailleurs !
Je suis… je suis dans un champ, sous un petit bosquet d’arbres qui m’abrite du soleil. Il fait une fraîcheur agréable et les oiseaux gazouillent. Quand même, il y a un truc qui pique. Je crois que je me suis encore installée sur une fourmilière !!! Je soulève une paupières et regarde furtivement les futures mamans qui profitent de leur paysage avec un air béat. Pourquoi elles et pas moi ? Concentration…
Je suis… je suis à la montage, je me suis un peu éloignée des pistes, il y a des sapins, l’air est doux, la neige me protège de toutes les bestioles qui s’ébattent à cet endroit quand arrive le printemps. J’ouvre les yeux, fâchée, lorsque la neige fondue commence à me dégouliner dans le cou. L’idée de la nature, décidément, ne me convient pas, il me faut bien trouver une solution de repli. Oublions la nature. Concentration.
Je suis… je suis dans ma voiture, c’est le printemps, il y a un beau ciel bleu au-dessus de ma tête et j’ai décapoté le toit. La radio joue ma chanson préférée du moment : Relax, par Mika. Je me laisse bercer par le vrombissement régulier des voitures qui passent à 130km/h sur l’autoroute A12. Je me sens bien, je suis détendue…
Fin de la séance, les futures mamans décrivent leurs paysages d’un air exalté. Je baisse les yeux et trouve un prétexte pour quitter la salle en catimini. Je crois que je vais retourner voir l’obstétricienne pour négocier la césarienne.